4. Interventions, conséquences et punitions
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Cette section du Module de formation sur la gestion de classe comporte deux parties. Dans la première, nous examinerons trois stratégies d’intervention, puis nous réaliserons une activité d’apprentissage. Dans la seconde, nous traiterons des conséquences et des punitions, puis nous conclurons le module par un jeu de rôles.
Les stratégies d’intervention
1. L’approche CALMER
Sachant que les mauvais comportements sont inévitables, l’une des meilleures façons de s’y préparer consiste à fourbir l’arsenal de compétences nécessaires pour les gérer et les désamorcer. Lorsqu’un incident se produit, il faut d’abord tenter de déterminer l’obstacle qui a entraîné le mauvais comportement. S’agissait-il :
- d’un obstacle comportemental, comme une idée fausse, un stéréotype, une étiquette réductrice ou une crainte?
- d’un obstacle environnemental, comme un espace mal adapté ou non sécuritaire, ou qui ne favorise pas l’apprentissage de l’élève?
- d’un obstacle lié au programme, comme un manque de formation, de temps ou de ressources?
Si l’incident se répète, c’est que l’obstacle en cause n’a pas été corrigé. Or si on ne s’attarde jamais aux causes d’un comportement, il sera difficile de trouver la façon de changer ce comportement.
Pour gérer une situation difficile, on peut adopter l’approche « CALMER », pour considérer, agir, limiter et rétablir (adaptation libre de l’anglais CALM : Consider, Act, Lessen, and Manage). Cette méthode de gestion de classe vise à limiter les perturbations et à maintenir une ambiance positive, constructive et propice à l’apprentissage.
Lorsque vous considérez un comportement pour déterminer s’il est perturbateur, demandez-vous si celui-ci affecte la sécurité, l’apprentissage ou le bien-être de son auteur ou de ses collègues de classe. Cela vous aidera à déterminer quand et comment intervenir. Évitez de réagir au moindre incident; agissez uniquement lorsque c'est nécessaire. Et limitez votre intervention aux élèves qui ont un comportement dérangeant. Soyez un ninja de la gestion de classe! Moins vous impliquez le reste de la classe, mieux ce sera. Enfin, une fois votre intervention faite, hâtez-vous de rétablir la situation et de reprendre votre activité. Cela réduira la distraction des autres élèves et favorisera la reprise de l’activité en cours.
2. Interventions verbales et non verbales
Pour gérer un mauvais comportement, on peut choisir entre des stratégies d’intervention verbales ou non verbales. Pouvez-vous trouver des exemples de ces deux types de stratégies? Lesquelles adoptez-vous en premier généralement, et pourquoi? Si on compare ces stratégies dans la perspective de l’approche CALMER, lesquelles sont plus invasives et lesquelles le sont moins?
On considère généralement que les interventions non verbales sont moins invasives et qu’elles constituent le meilleur choix de départ. En voici quelques exemples :
- La non-intervention délibérée : On évite de réagir au comportement perturbateur (fonctionne bien lorsque l’élève chuchote, parle fort ou interrompt).
- L’intervention par signaux : On communique avec l’élève qui a un comportement perturbateur sans déranger ses collègues (ex. : se racler la gorge, rouler les yeux, faire non de la tête, regarder dans les yeux).
- L’intervention rapprochée : On se rapproche physiquement de l’élève (ex. : continuer d’enseigner en se tenant à côté du participant).
Lorsque les interventions non verbales ne donnent pas le résultat escompté, on passe souvent aux interventions verbales. En voici quelques exemples :
- Le renforcement par l’exemple : On met l’accent sur les comportements adéquats des pairs, car un bon comportement renforcé est plus susceptible d’être répété. Ex. : « Je te félicite d’avoir levé la main pour répondre à la question » OU « Je vois que Mélissa est assise et prête à commencer, ah, et Catherine aussi... ».
- « Ce n’est pas fait pour »: On utilise ce genre d’énoncé pour faire cesser un comportement, en particulier chez les plus jeunes. Ex. : « Une chaise de bureau, ce n’est pas fait pour se bercer », « Une main, ce n’est pas fait pour frapper les autres ».
- La cassette : On répète plusieurs fois le même message.
- Animatrice : Antoine, arrête de donner les réponses. Tu dois lever la main pour répondre à une question.
Élève : Mais je connais la réponse.
Animatrice : Tu dois quand même lever la main pour répondre à une question.
Élève : Mais tu as laissé quelqu’un d’autre répondre sans lever la main.
Animatrice : Tu dois quand même lever la main pour répondre à une question.
- La requête : On demande poliment à l’élève de modifier son comportement. Ex. : « Catherine, peux-tu arrêter de donner les réponses afin de laisser la chance aux autres de répondre? »
- La redirection explicite : On intime l’ordre à l’élève de cesser son comportement et de respecter la consigne. Ex. : « Catherine, arrête de donner les réponses et lève ta main si tu veux répondre à une question. »
- Les trois questions de Glasser : On pose à l’élève une série de questions pour l’aider à adopter un bon comportement : 1) Que fais-tu? 2) Est-ce que c’est permis? et 3) Que devrais-tu plutôt faire? (Pour remplacer un mauvais comportement par un bon comportement.)
- L’humour : On raconte une blague ou une histoire cocasse pour ramener l’attention du groupe sur soi (prendre garde au sarcasme).
- Dire « je » : On décrit les effets du comportement sur les autres et sur soi, on explique comment on se sent afin d’amener l’élève à tenir compte des sentiments des autres. Cette méthode est plus efficace quand on l’applique en trois temps :
- On décrit le comportement perturbateur (ex. : « Catherine, tu ne lèves pas la main pour poser une question. »)
- On décrit l’effet du comportement sur les autres (ex. : « Cela empêche les autres élèves de poser des questions. »)
- On décrit comment cela nous affecte comme responsable de l’animation (ex. : « Je me sens incapable de continuer la leçon. »)
- La prise de conscience : On sensibilise les élèves aux conséquences de leurs actes. Ex. : « Catherine, savais-tu que lorsque tu réponds aux questions sans lever la main, les autres ont moins de chances de participer au cours? »
- Nommer l’élève : On nomme l’élève pour attirer son attention de manière plus subtile. Ex. : « Catherine, peux-tu nous dire quelle est la prochaine étape? » Et non : « Catherine, j’ai remarqué que tu parlais. Peux-tu répéter ce que je viens de dire? »
3. L’échelle des interventions
L’échelle des interventions permet de gérer un mauvais comportement de manière graduelle. Au niveau le plus bas de l’échelle, on n’intervient pas, et au niveau le plus haut, on ne donne aucune possibilité de choisir à l’élève et on interrompt complètement l’activité.
On peut appliquer l’échelle en adoptant la méthode du chevauchement, qui consiste à régler deux problèmes en même temps afin de limiter les perturbations pour le reste du groupe. En voici un exemple :
Alors qu’il réalise une activité avec un petit groupe d’élèves, un animateur remarque que deux élèves jouent aux cartes plutôt que de participer. Pour corriger ce comportement, l’animateur a deux possibilités :
- Cesser l’activité pour tout le groupe, aller voir les joueuses de cartes et leur demander de se mettre à la tâche, puis tenter de reprendre l’activité.
- Interpeller de loin les deux joueuses de cartes pendant que le reste du groupe poursuit l’activité, puis se rapprocher des deux élèves pour surveiller leur travail pendant qu’il continue d’enseigner à l’ensemble du groupe.
Comme vous pouvez le constater, la deuxième approche nécessite qu’on fasse deux choses à la fois. Pour être efficace, cette méthode requiert donc qu’on demeure soi-même pleinement concentré sur ce qui se passe dans la classe. Si les élèves savent qu’on supervise le travail de chacun de loin et peut intervenir au besoin, ils seront plus susceptibles de maintenir leur attention sur la tâche à faire.
Dans la prochaine activité, vous ferez un exercice de réflexion sur l’utilisation de l’échelle des interventions. Par la suite, vous mettrez cette échelle en pratique dans le cadre d’un jeu de rôles.
Activité 4 : Utiliser l’échelle des interventions
Dans votre cahier d’activités ou un carnet de notes, inscrivez des exemples illustrant l’utilisation de chaque niveau de l’échelle dans un contexte d’enseignement réel. Imaginez à quel moment ou dans quelles circonstances vous devriez passer à ce niveau d’intervention.
Niveaux/étapes de l’échelle des interventions (en ordre croissant) | Exemples |
Ne rien faire | |
Donner de l’information | |
Donner la possibilité de choisir | |
Orienter le choix en modifiant les consignes | |
Orienter le choix par des moyens incitatifs | |
Orienter le choix par des moyens dissuasifs | |
Restreindre la possibilité de choisir | |
Éliminer la possibilité de choisir |
Activité de groupe optionnelle
Vous pouvez faire cette activité de groupe si vous suivez la formation en compagnie d’autres membres de votre équipe ou lors de votre prochaine réunion.
Scénario : L’un de vos élèves n’est manifestement pas intéressé par ce qui se déroule en classe. En dépit de vos multiples tentatives pour susciter l’enthousiasme du groupe et diversifier les activités, il passe son temps à se balancer sur sa chaise et à regarder dehors. Vous vous préoccupez de sa sécurité (balancement sur la chaise) et de son intégration (manque de participation aux activités de groupe). Bien que ce comportement ne constitue pas une source de distraction ou de perturbation, vous décidez d’agir. Que faites-vous?
Tâche : Chaque membre du groupe choisit une stratégie parmi les interventions verbales et non verbales décrites précédemment et la met en pratique (sans la nommer) devant le groupe. Les autres membres du groupe doivent deviner de quelle stratégie d’intervention il s’agit.
Conséquences et punitions
Maintenant que nous avons étudié les stratégies d’intervention, tournons-nous vers les conséquences et les punitions.
Il existe deux principaux types de conséquences : les naturelles et les logiques. Les conséquences naturelles sont les résultats inévitables d’un comportement dont l’auteur est entièrement responsable. Les conséquences logiques requièrent une intervention extérieure (p. ex. celle de l’animateur ou animatrice) et devraient être directement reliées au comportement.
En revanche, les punitions n’ont généralement pas de lien direct avec les comportements qu’elles visent à sanctionner. Comme les conséquences logiques, elles requièrent une intervention extérieure, mais comme elles ne sont pas directement reliées aux comportements, elles n’entraînent pas nécessairement le changement durable qu’on souhaite obtenir. Autrement dit, contrairement à ce qu’on croyait autrefois, les punitions ne sont pas nécessairement le moyen le plus efficace de régler les problèmes de comportement.
Passez en revue ce tableau sur les différences entre les conséquences et les punitions, puis passez à l’activité 5 pour analyser ces différences dans divers scénarios.
Conséquences... | Punitions… | |
Comportements résultants | N’entraînent pas de comportements de fuite ou d’évitement | Entraînent des comportements de fuite ou d’évitement |
Ressentiment | Ne provoquent pas de ressentiment | Provoquent du ressentiment |
Interaction de l’animateur ou animatrice | Ne requièrent pas d’interaction négative avec l’élève | Requièrent une interaction négative avec l’élève |
Concept sous-jacent | Fondées sur le concept d’égalité (approche sévère, mais juste) | Fondées sur le concept de pouvoir |
Message véhiculé | Indiquent à l’élève qu’il peut maîtriser son comportement | Indiquent à l’élève que son comportement doit être maîtrisé par l’animateur ou l’animatrice |
Activité 5 : Conséquence naturelle, conséquence logique ou punition?
Dans votre cahier d’activités ou un carnet de notes, donnez un exemple de conséquence naturelle, de conséquence logique et de punition pour chacun des scénarios ci-dessous. Vous pouvez ajouter des scénarios tirés de votre expérience personnelle dans les espaces prévus à cet effet dans le tableau.
Scénario | Conséquence naturelle | Conséquence logique | Punition |
Un élève endommage le projet d’une collègue | |||
Une élève décide de manger sa collation avant l’heure prévue | |||
Deux élèves jouent à Minecraft alors qu’ils devraient être en train de ranger leur matériel | |||
(Votre scénario) | |||
(Votre scénario) |